29 novembre 1995 - Annonce | Calendrier | Nouvelles | Politique | Social | Sports
L'État allège la dette, mais les cheminots veulent des certitudes
SNCF: le bras de fer continue
Pas de traln hier pas davantage aulourd'hui. La décision du gouvernement d'alléger la dette de la SNCF de 37 mllllards de francs n'a pas calmé le jeu. A leur 6e jour de gréve Ies chemlnots durcissent Ieur mouvement. Tandls que l'apoplexie gagnene les grandes vllles emboutelllées.

Le gouvernement a voulu hier passer " un signal fort " aux cheminots assure Bernard Pons le ministre des Transports. L'État va en effet alléger la dette de la SNCF (175 milliards de francs) de 37 milliards en 1996. Une enveloppe qui correspond au déficit cumulé du précédent contrat de plan (1990-1994) plus le déficit de cette année (12 milliards).

A partir de 1997 la dette sera allégee en tonction des résultats de l'entreprise: chaque franc gagné sur le resultat d'exploitation de la SNCF sera accompagné d'un allégement par l'Etat d'un franc des charges financières. Et si la SNCF respecte les efforts qui lui sont fixés par le contrat de plan le ministère du Transport calcule ." qu'en cinq ans, elle pourra oblenlr une contribution a son désendettement de plus de 100 mllllards ". Qui correspondent précisement à ce qu'elle a investi depuis cinq ans dont 50 milliards pour le seul TGV.

" Marché de dupes "

" Une preuve de confiance une chance réelle pour l'entreprise " réagissait hier le president de la SNCF, Jean Bergougnoux, à l'annonce officielle. Non, répliquent en ch ur les syndicats: avec ce geste I'Etat a tout faux. L'offre est largement " insutfisanle à l'antithèse des revendications ", estime la CGT tandis que la CFDT la qualifie de " marché de dupes inacceptable ".

Durcissement

Les deux syndicats partagent leur analyse: " Si 38 milllards de désendettement n'ont pas suffi en 1990 " quand la dette s'elevait à 119 milliards, " commenl 37 milliards pourraient-ils suffire aujourd'hui ? ", alors que ce même endettement est passé à 175 milliards... La CFDT estime du coup que "I'État engage la SNCF dans une loglque de déclln ", tandis que la CGT réclame qu'on réécrive purement et simplement " un nouveau contrat be plan ".

" Aux syndlcats de prendre leurs responsabllites ": la déclaration de Jean Bourgougnoux, hier soir à l'issue d'une table ronde de plus de trois heures entre syndicats et direction de la SNCF n'a pas calmé les cheminots. La réponse des syndicats s'est faite dans la foulee: un " avis négatif " sur le contenu du projet de contrat de plan et " maintien intégral " de leur regime spécial de retraite. Bernard Pons a beau préciser de son côté qu'" il n'a jamais été question de remettre en cause l'âge de départ à la retralte " les inquiètudes demeurent. D'autant que Raymond Soubie I'un des huit membres de la Commission Le Vert chargée de la réforme des régimes spéciaux de retraites a confirme que le gouvernement a " I'lntention de mettre à plat ce maquls herité de l'hlstolre ".

Le bras de fer se poursuit donc. Entre des cheminots résolus - " Le mouvement va se durclr dès mercredl " - et un gouvernement qui campant tout aussi fermement sur ses positions multiplie les déclarations.

Le régime sans trains ou presque, du nord au sud. Ici, à Lille, où les cheminots occupaient les voies. La capital vit à I'heure des bouchons: le périphérique était complètement embouteillé, hier.
Le trafic SNCF (trains et RER) devrait être quasiment paralysé, aujourd'hui comme hier, sur l'ensemble du territoire. Dans l'Ouest, où le personnel roulant était particulièrement motive par le mouvement, aucun train n'a circulé en Bretagne et Pays-de-Loire, tant sur les grandes lignes que les liaisons regionales. En Basse-Normandie, seules dix liaisons ont été assurées par un service de cars. Le poste d'aguillage du Mans était toujours occupé, hier. Aujourd'hui, aucun train ne devrait rouler en Bretagne. Pays-de-Loire et Basse-Normandie ne seraient pas mieux loties. Le dernier TGV qui a pu qutter Rennes pour Paris est parti lundi. La situation est telle que les prévisions définitives de trafic n'étaient attendues que tard dans la nuit, voire ce matin, en fonction des résultats de la table ronde direction-syndicats, puis des assemblées générales qui devaient suivre dans les dépôts.

Renseignements " voyageurs ": 40 45 42 87, 45 82 50 50, 36 15 SNCF.

" Les rails vont rouiller... " Remarque ironique et pourtant émue d'un vieux cheminot. La ligne Le Mans-Paris n'a pas vu passer un seul wagon, hier: " On n'a jamais vu ça ". Au sixième jour de la grève, le scénario est désormais bien huile. Tandis que dans les dépôts les cheminots lèvent le bras pour reconduire leur mouvement, les panneaux d'affichage des gares restent partout desesperément vides.

Et l'asphyxie sort des rails pour gagner toute la France : 400 km de bouchons autour de Paris, totalement paralyse, et 100 km en province (dont 4 à Nantes). Le Centre national d'information routière (Cnir) conseille " d'eviter d'utilser son vehicule pour se déplacer ". Aux plus courageux, il propose la marche ou le vélo. Ce qui sera, aujourd'hui encore, la meilleure façon de se déplacer.

Ce qui fait " hurler " des fedérations d'usagers qui veulent créer " un comté pour l'indemnisatlon des vlctme~ de la grève ". A Paris, ils demandent d'ores et déjà la gratuité de la carte orange pour décembre.